Le Nord sauvage - Une caverne abritant une cité fortifiée naine il y a environ 70 ans.
- Hé bah t'voilà enfin père mon gros caillou ! T'devrais être content !
Oldra Defervêtu se réjouissait davantage que son époux Gotrek, qui observait la petite chose dans les bras de sa femme avec suspicion.
- C't'une fille, par la barbe de Moradin ! Quand j'pense qu'on a b'soin d'guerriers pour défendre la cité contre ses fichus gobelins... V'là que tu m'ponds une pleureuse.
Mais le regard paternel ne pouvait s'empêcher d'être fier de sa progéniture, tant la petite Irrynn faisait déjà preuve de son héritage Defervêtu, refusant net le sein maternel pour essayer d'attraper la choppe de bière posée près du lit.
Massant avec un intérêt croissant sa barbe soigneusement tressée, Gotrek finit par admettre que malgré sa déception, la petite fille pourrait tout aussi bien apprendre à manier la hache que le rouleau à pâtisserie. Après tout, la différence résidait principalement dans le type de dégâts. Ainsi fut-il décidé par le patriarche familial, sans que personne ne contredise cela.
Il est en effet courant chez les nains d'éduquer les filles comme les garçons et lorsque la cité a besoin de bras, elles ne sont pas en reste pour repousser les ennemis.
Quelques décennies plus tard...
- Bon sang, bubuse ! J't'ai dit d'pas la tenir comme ça ta hache !
Penaude, Irrynn baissa les yeux vers le sol. L'entraînement que son père lui faisait subir n'était pas de tout repos, et il n'avait de cesse de la reprendre si sa main avait un décalage jugé trop important pour le maintien de l'arme. Elle raffermit sa prise sur l'arme, bien décidée à se montrer digne de l'enseignement qu'elle recevait.
- Voilà, c'bien mieux !
La passe d'armes reprit, rythmée par les entrechocs des armes et les râles paternels sur tel ou tel geste raté, mal fait, mal placé. Mais la jeune naine progressait et suivait les conseils de son père et maître d’armes le mieux possible.
- Ton arme, c’le prolongement d’ton bras ma fille ! Tu dois n’faire qu’un avec elle, elle fait partie d’toi ! Tu dois pouvoir t’battre même les yeux fermés !
Elle s’appliqua au mieux pour que la hache fasse partie d’elle. De toute façon, cela ne lui fut pas difficile, son père lui ayant imposé de ne jamais s’en séparer. Dormir avec, manger avec, se battre avec évidemment…
- C’ton arme qui f’ra de toi une naine reconnue de tous ! Tu n’dois pas t’en séparer !
La fierté de la famille passait surtout par l’exploit personnel avant toute chose. Gotrek avait ramené une tête de géant un jour, et suite à cette exploit il avait été nommé maître d’armes de la cité. Il ne rêvait que d’exploits, agrandissant encore et encore l’éclat de son nom. Irrynn avait parfois entendu parler d’exploit de clans, d’actes héroïques passés et lointains, de traditions ancestrales, mais ces histoires semblaient être des mythes racontés aux enfants pour les faire rêver plus qu’autre chose. Irrynn décida donc qu’elle suivrait les traces de son père et ramènerait la tête d’un géant elle aussi, voire même deux !
Le temps passe encore… Inexorablement.
Irrynn avait désormais acquis sa taille adulte. 1m35, et des muscles plein les bras, les jambes. Le maniement de la hache d’armes était devenu une seconde nature pour elle, et elle se mêlait désormais aux patrouilles qui partaient en « reconnaissance » dans les mines. C’est ainsi qu’elle fit la connaissance de Negnus, un nain qu’elle trouva mieux que les autres, à l’humour décoiffant (Ce qui tombait bien vu qu’il était chauve, jugea-t-elle). Séduite par l’humour de ce guerrier à peine plus vieux qu’elle, mais aussi par son habile maniement de la hache, elle entra dans une phase conquérante qui lui prit autant de temps que l’apprentissage du combat. Sa première victoire, et non des moindres ! fut donc de ramener un nain en vie plutôt qu’un géant mort dans son foyer familial. Quittant alors ce dernier, elle prit le patronyme de sa moitié et rejoignit la famille de BraveHache. Cela n’empêcha pas Gotrek de poursuivre les entraînements avec elle, loin de là. Pendant ce temps, son nain lui s’entraînait aussi, ce qui attira de nombreux regards curieux de connaître la place de la hache dans leur couple.
Et le temps a encore passé (Sisi).
La mort du père de Negnus dans une mauvaise altercation dans les mines, qui valut aussi au nain de nouvelles blessures de guerre plus graves que les précédentes, renforça la volonté de la jeune naine à savoir se battre et éradiquer tous ces maudits gobelins et autres créatures trop laides de la surface de Toril. Irrynn encouragea de son mieux Negnus dans la noble voie du protecteur nain, elle-même travaillant davantage son attaque et ses prouesses martiales suivant toujours l’entraînement que lui offrait son père Gotrek. Elle accompagnait lors de son temps libre son époux nain dans les mines, soit-disant pour le surveiller et rassurer ainsi les guérisseurs qui voyaient d’un mauvais œil l’agitation incessante du guerrier - du moins avait-elle trouvé ce prétexte pour garder un œil sur lui et en profiter pour dépiauter quelques gobelins égarés à coups de hache, réfléchissant au concept paternel de fusion avec l’arme. Un malheureux gobelin en fut d'ailleurs pour ses frais lorsque d’un coup magistral elle lui trancha la tête, sentant comme une énergie mystique et curieuse lui traverser le corps à ce moment-là. Troublée par un tel phénomène qui lui rappela presque sa nuit de noces, elle décida d’y repenser à tête reposée, lors de leur retour de la mine. Puis elle oublia rapidement cette nouveauté alors que Negnus l’appelait pour lui montrer sa découverte : une arche étonnante couverte d’inscriptions auxquelles elle ne comprenait rien – aucune importance seul le dethek valait la peine d’être lu ! Passant alors la tête de l’autre côté pour voir si l’arche présentait les mêmes signes sur sa face cachée, elle se sentit alors partir pour la seconde fois de la journée, et rouvrit les yeux en plein air, éblouie par la lumière du soleil et assourdie par les cris d’un type qui parlait plus fort qu’elle.
Peu de temps après, sa moitié naine apparut derrière elle et sa douce voix la ramena à la réalité.
- Bon sang Irrynn, j’ai plus MA HACHE !!
Réalisant que la sienne avait aussi disparu lors de ce bond dimensionnel étrange, sa voix couvrit alors celle de l’homme qui s’agitait sur l’estrade et de la jeune halefeline rousse qui tentait de l’accueillir sur Almirande.