L'atmosphère est lourde, ma vue se brouille, j'étouffe. Dans l'air, l'humidité reigne, l'obscurité également, du moins le noir scintille d'une multitude d'étoiles, infimes et incertaines, un tourbillon, je suis aspiré, plus rien ne se joue autour de moi, le silence emprunt de mouvements... le néant.
Sensation amère, le drame se perpétue de tout temps... un instant de vie suffit, mais où se situer... où suis-je, quelle époque, mes souvenirs sont nombreux et pourtant entremélés d'incertitudes. Ai-je connu tout ceci, est-ce là l'héritage des âges, de mes ancêtres, n'est-ce que pure divagation...
L'enfant est assis paisiblement, son visage est harcelé par les rayons chaleureux d'un Soleil d'été, le ciel est bleu, la vie s'écoule et le sourire est contagieux. Assis là, il ne devine pas, il ne s'y attend pas.
A quelques mètres, un souffle, un bruit sourd et violent... le corps décharné, lambeaux de chaire, des éclats multiples et abrasifs. L'explosion a tout soufflé sur son passage, il est étendu, innocent, absent, éteint.
Un vent chaud et salé entre dans les terres, on y écoule une vie d'harmonie et d'osmose, faune, flore, civilisation éphémère ou indigène... balayée par un fracas venu de la mer, des hommes plein de certitudes, de convictions...
Des sillons marins bien décidés à accoster pour étaler la vérité, leur vérité... ici se joue le destin d'un peuple décimé... qu'attendaient-ils, qu'espéraient-ils, on est pourtant venu les trouver. Imposant leur vie sortie de nulle part, l'acier vint clore les différents... flèches et lances ne purent rien face à cet étalage barbare des dits "plus civilisés".
Terre d'accueil et d'écueil, nouveau continent, par le prix du sang.
Une douce nuit, fenêtre ouverte, corps étendu dans un repos éternel. Sable chaud venté, irritant. La lame fila de tout son tranchant, ce fil rouge répandu dans des drapées de sang. Aucun souffle, aucun râle sinon étouffé, les yeux enfin exhorbités de surprise... la gorge tranchée.
A-t'-il pu se demander pourquoi, avait-il connaissance de sa destinée... fut il victime d'une volonté certaine ou dictée...
Projectil fendant l'air, impact sourd, son corps se brise, une douleur éphémère mais vive avant que ne s'engourdissent tous ses membres, spasmes nerveux. La mort oblongue s'est jouée, précision funèbre pour raison acerbe.
Je reprends mon souffle, je suffoquais, me voilà à genoux. Je sens quelques larmes chaudes couler sur mes joues, mais je ne réalise pas.
Une vision étrange, de peuples et de sang, l'histoire s'écoule, je la révèle à mes sens. La conviction, la croyance, la haine, l'ignorance, la peur de subir la volonté d'un autre horizon, inconnu, culture, imposture... le sang versé à de multiples causes. Les victimes où sont-elles, que font-elles.
La folie possède un périmètre exigu, son épicentre est victime, ses alentours sont témoins, ses limites sont conscience. L'ignorance elle, reine de ses frontières. Qui s'attristera hors de ses frontières, qui s'apitoiera, qui oubliera... l'histoire des hommes est faite d'oublie, mon histoire est toute autre, mais pourtant si liée.
Mes mains libèrent mon ventre, chaire et sang répandu, la cible, l'épicentre je fus, d'une cause absolue... on assoie sa domination dans la mort, éliminer son porchain par peur d'être soumis à la volonté des autres, des horizons différents, si lointains et inconnus.
Mon corps se libère de la souffrance, mon esprit joue ses dernières vertues, la douleur s'évade, la peur également, mais qui, qui prendra le temps... de m'attendre, de patienter... avant de pester.
L'espace d'une conscience, d'une reflexion je serais absent, attendu, pesté... mais bientôt certains souffriront de ne m'avoir jamais entendu les saluer.
Mon entourage, ma famille, mes amis je n'aurai qu'un seul regret... de ne vous avoir jamais dis au revoir... sans espoir, ni attente, je m'essouffle et m'éteins... sans y avoir été invité, sans l'avoir ne serait-ce qu'envisagé.
Tant de questions auparavant... qu'y a-t-il après... qu'y a-t-il derrière la fin... la réponse m'attend, jamais vous ne l'entendrez avant de l'arpenter... le néant.
(@Ecthe-Eze 2006]